Les familles LGBTQ+ rencontrent des défis financiers uniques qui s’ajoutent souvent aux pressions quotidiennes vécues par les familles non LGBTQ+. Bien que le mariage homosexuel ait gagné une reconnaissance légale dans beaucoup de pays à travers le monde, des inégalités systémiques et des biais sociaux continuent d’avoir un impact sur le bien-être économique des foyers homoparentaux. Ces différences sont particulièrement frappantes concernant les revenus, les économies et l’accès aux services essentiels comme le logement ou la santé. Cet article se penche sur les difficultés financières spécifiques aux familles LGBTQ+, avec une attention particulière portée aux facteurs tels que les disparités de revenus, les coûts pour entretenir la famille, et l’impact des barrières légales et sociales.
Écart de revenus
Aux Etats-Unis, les adultes LGBTQ+ continuent de faire face à des disparités financières significatives par rapport à leurs comparses non LGBTQ+. Selon les données du bureau de recensement Household Pulse Survey (HPS) de 2022, 22% des adultes LGBTQ+ gagnent moins de 25 000$ par an, contrairement à 14% des adultes non LGBTQ+. De plus, les adultes LGBTQ+ ont moins de chance d’atteindre des niveaux de revenu plus élevés, avec seulement 23% de ménages recensés ayant des revenus de 100 000$ ou plus, comparé à 31% pour les adultes non LGBTQ+.
Le rapport de la réglementation prudentielle, “The LGBT Financial Experience” ou “L’expérience financière LGBT”, conduite entre 2016 et 2017, met ces déséquilibres en évidence. Basé sur un sondage en ligne concernant les citoyens américains, ce rapport a analysé les réponses de 1 376 personnes LGBTQ+ et 503 personnes issues de la population générale. Les résultats indiquent que l’écart de revenus va au-delà des limites du genre et est influencé par l’orientation sexuelle. Les femmes lesbiennes avec une moyenne d’âge de 42 ans ont déclaré un revenu annuel de 45 606$, alors que les hommes gays avec une moyenne d’âge de 46 ans ont déclaré un revenu annuel de 56 936$. Les femmes bisexuelles avec une moyenne d’âge de 36 ans gagnent 35 980$ par an, alors que les hommes bisexuels avec une moyenne d’âge de 43 ans gagnent 85 084$ par an. Les femmes hétérosexuelles avec une moyenne d’âge de 45 ans gagnent environ 51 461$. De plus, les données SHED indiquent que 44% des adultes LGBTQ+ sont propriétaires, comparées à 68% pour les adultes non LGBTQ+.
Malgré les difficultés financières globales rencontrées par les familles LGBTQ+, certaines sous-catégories font face à de plus grandes épreuves encore. Ces données mettent en évidence la considérable différence de salaire au sein de la communauté LGBTQ+ : en effet, les femmes lesbiennes et bisexuelles ont constamment des revenus significativement plus bas que leurs homologues gays ou bisexuels. En conséquence, les couples lesbiens font plus souvent face à de sévères difficultés financières que les couples gays. L’enquête sur les finances des consommateurs (Survey of Consumer Finances, SCF) de 2013 à 2019 met en évidence ces disparités, montrant que les couples lesbiens ont une richesse médiane de 82 000$, moins de la moitié de la richesse médiane des couples hétérosexuels. Une analyse plus poussée de l’enquête sur l’économie des foyers et de la prise de décision (Survey of Household Economics and Decision making, SHED) menée en 2021 montre que 65% des femmes bisexuelles ont des économies et des investissements de ménage inférieurs à 50 000$, soit un pourcentage qui surpasse toutes les autres catégories d’identité de genre/d’orientation sexuelle. En opposition à cela, seulement 45% des femmes hétérosexuelles déclarent avoir moins de 50 000$ d’économies et d’investissements. Cette inégalité financière peut augmenter le stress associé à la planification familiale, puisque les familles LGBTQ+ encourent souvent le risque de s’exposer à des coûts additionnels en agrandissant leurs familles.
Parentalité
L’épopée de la parentalité est exigeante, peu importent les individus. La discrimination reste un problème majeur, comme illustré par l’expérience d’un homme gay de 38 ans vivant au Luxembourg, qui a déclaré à l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne : “En tant que famille LGBT avec enfants, nous avons définitivement besoin de plus de droits et de reconnaissance. Personne n’est formé adéquatement sur les familles LGBT, notamment les professeurs et le personnel administratif, ce qui est un problème majeur en 2023.”
Au-delà des obstacles dus à la discrimination, les coûts pour élever un enfant, comme la garde des enfants, la santé, la nourriture, les vêtements et l’éducation sont considérables. Aux Etats-Unis, le coût moyen estimé pour élever un enfant dans les huit premières années de sa vie dépasse les 230 000$. En 2018, le rapport “Construire des familles LGBTQ+ : le prix de la parentalité” (“Building LGBTQ+ Families: The Price of Parenthood”) publié par Family Equality met en évidence le croisement entre les coûts relativement élevés pour construire une famille LGBTQ+ et le taux de pauvreté disproportionnellement élevé de ces communautés. Le rapport montre que les familles LGBTQ+ font souvent face à des dépenses accrues à l’arrivée d’un nouvel enfant par l’adoption, les familles d’accueil ou la procréation médicalement assistée.
Les personnes LGBTQ+ ont des options diverses concernant la croissance de la famille, incluant la famille d’accueil, l’adoption, l’insémination à la maison, des arrangements de coparentalité platonique, la maternité de substitution ou les procédures médicales comme la fécondation in vitro (FIV), l’injection intracytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI), la préservation des gamètes et des embryons, et l’utilisation de médicaments liés à la fertilité. Chaque possibilité vient avec son propre panel de coûts et de conditions légales pour assurer les droits parentaux, ce qui rend ces possibilités plus ou moins accessibles aux individus avec des niveaux de revenus et de privilèges sociaux variés. Le coût d’une FIV avec ses propres ovules peut varier entre 2 500€ et 7 000€, en fonction du pays où la procédure est pratiquée. Le don d’ovules coûte habituellement entre 4 000€ et 12 000€. La conservation d’ovules a un coût estimé entre 1 600€ et 5 000€. La maternité de substitution n’est pas légale dans la majorité des pays, ce qui rend l’accès à cette option limité. Les coûts qui y sont associés sont élevés, débutant habituellement à 50 000€ pour avoir recours à une mère porteuse.
Légalisation du mariage homosexuel dans l’Union européenne et aux Etats-Unis
La légalisation du mariage homosexuel a permis aux couples d’accéder à des protections cruciales contre la discrimination, et a permis un accès à de nombreux avantages financiers et légaux. Une femme lesbienne issue de la période du baby-boom a expliqué à Prudential : “[…] Je n’avais pas encore réalisé à quel point le droit de nous marier était important. Ça permet aux gens d’être inclus dans la société, et leur permet d’être une famille comme toutes les autres.” Ces avantages incluent des avantages sur les taxes, une assurance santé, le droit de visite à l’hôpital et la reconnaissance officielle en tant que couple marié. Dans le cas où un des partenaires meurt, le mariage homosexuel assure l’héritage et une couverture d’assurance pour le partenaire vivant et les enfants, leur donnant accès à une sécurité financière et légale absolument vitale. “Je n’ai plus à m’inquiéter de ce qu’il va arriver à mon mari après ma mort. Maintenant que nous sommes mariés, ses intérêts sont protégés” a déclaré pour Prudential un homme gay issu lui aussi du baby-boom. À partir de février 2024, 21 pays européens avaient légalisé le mariage homosexuel. Cela inclut l’Andorre (2023), l’Autriche (2019), la Belgique (2003), le Danemark (2012), l’Estonie (2024), la Finlande (2017), la France (2013), l’Allemagne (2017), la Grèce (2014), l’Islande (2010), l’Irlande (2015), le Luxembourg (2015), Malte (2017), les Pays-Bas (2001), la Norvège (2009), le Portugal (2010), la Slovénie (2022), l’Espagne (2005), la Suède (2009), la Suisse (2022) et le Royaume-Uni (2013). Aux Etats-Unis, le mariage homosexuel a été reconnu dans tous les états en 2015.
Pas à pas
Une approche multiple est nécessaire pour remédier aux disparités financières rencontrées par les familles LGBTQ+ Toutefois, les législateur.trices doivent mettre en place des mesures pour combattre les discriminations sur le lieu de travail, assurant un salaire et des opportunités égales pour toutes les personnes LGBTQ+. De plus, étendre l’accès à un système de santé, une garde d’enfant et une éducation abordables est crucial pour réduire le poids financier qui vient avec une vie de famille. Les personnes LGBTQ+, qui font souvent face à des difficultés financières uniques, sont fortement encouragées à prioriser leurs finances personnelles et établir un budget clair pour elles et leurs familles. En mettant en place des stratégies budgétaires efficaces, en économisant assidûment, en gérant les dettes de manière responsable et en ayant une meilleure compréhension du système de crédit, les personnes LGBTQ+ peuvent avancer plus efficacement vers une indépendance financière et leur créer un avenir plus sûr. Les finances personnelles n’ont pas à être intimidantes. En avançant pas à pas, il est possible de démystifier les complexités et de construire une base financière solide.
Illustration: Isabel Spigarelli/Canva
Article traduit de l’Anglais par Félix Moliner Montmartin